Ni l’accord collectif de droit commun, ni l’accord de mise en place du CSE et relatif aux comités d’établissements ne peuvent priver un syndicat du droit de désigner un délégué syndical au niveau d’un établissement
Commentaire d’un arrêt rendu dans une affaire défendue devant la cour de cassation par Manuela GREVY, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.
L’UGECAM Nord Est gère 29 établissements de l’assurance maladie en Lorraine et Champagne Ardennes.
Le 25 octobre 2019, un accord a été signé par les partenaires sociaux concernant la mise en place du Comité social et économique. Il prévoit de réduire le nombre des instances à 5 CSE d’établissements et un CSE Central.
Le syndicat SIPSCA CFDT a désigné Madame L. en qualité de déléguée syndicale au sein de l’établissement de Warnécourt.
Sa désignation a été contestée devant le Tribunal par l’UGECAM qui soutenait que le périmètre de désignation devait être le même que celui des nouveaux CSE d’établissement.
Madame L et le syndicat soutenaient au contraire que l’accord de mise en place n’aborde pas la désignation des délégués syndicaux et que l’article L2143-3 du Code du travail qui prévoit que : que chaque organisation syndicale représentative dans l’entreprise ou l’établissement d’au moins 50 salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueillis à titre personnel et dans leur collège au moins 10% des suffrages exprimés au 1er tour des dernières élections au CSE, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l’article L2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l’employeur. (…) Elle peut intervenir au sein de l’établissement regroupant des salariés placés sous la direction d’un représentant de l’employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques » devait s’appliquer.
Le tribunal a fait droit à la demande de l’employeur et il annulé la désignation de Madame L. au motif que l’accord de mise en place des CSE avait pour conséquence un nouveau périmètre de désignation des délégués syndicaux.
Le Syndicat SISCA CFDT a formé un pourvoi en cassation contre ce jugement.
La Cour de cassation, par arrêt du 8 décembre 2021, a cassé et annulé le jugement du Tribunal. Elle rappelle que les dispositions de l ’article L 2143-3 du Code du travail sont d’ordre public quant au périmètre de désignation des délégués syndicaux.
Elle ajoute : « Il s’en suit que ni accord collectif de droit commun, ni l’accord de mise en place du CSE prévu par l’article L2313-2 du code du travail concernant la mise en place du CSE et des CSE d’établissements ne peuvent priver un syndicat du droit de désigner un délégué syndical au niveau d’un établissement au sens de l’article L2143-3 du code du travail ».
La Cour de cassation constate aussi que l’accord de mise en place des CSE au sein de l’Ugecam Nord Est se borne à prévoir que chaque organisation syndicale représentative dans le périmètre du CSE peut désigner un représentant syndical au CSE mais qu’il ne dispose pas en matière de désignation des délégués syndicaux.
La juridiction de renvoi devra maintenant vérifier si la désignation de Madame L. au sein de l’établissement de Warnecourt répond aux conditions de l’article L.2143-3 du Code du travail.
L’employeur pourra difficilement le contester car l’établissement comptait déjà des délégués syndicaux avant la mise en place des nouveaux CSE.