Rares sont les contentieux portant sur la validité des accords relatifs à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Pourtant cette question est régulièrement au cœur de l’actualité tant subsiste une inégalité de traitement entre les femmes et les hommes, notamment, en matière de rémunération.
Dans cette affaire, la FBA CFDT demandait l’annulation de certaines dispositions de l’accord diversité conclu au sein de BNP PARIBAS.
En l’espèce, l’accord venait, notamment, prévoir que :
« La rémunération de base d’une salariée est équivalente à celle d’un salarié placé dans la même situation professionnelle (…)
D’autre part, la mise en place d’une méthodologie pour dentifier les différences salariales qui devront être prises en charge par le service RH « Cette méthodologie consiste à comparer, par métier repère de la convention collective, niveau de classification et tranche d’âge, la rémunération de base des femmes par rapport à la médiane de rémunération des hommes. Dès lors que cette comparaison fait apparaître un écart supérieur à 5 % de la médiane de rémunération des hommes au sein de l’entreprise, les gestionnaires Ressources Humaines en sont informés et doivent examiner les dossiers avec une attention toute particulière dans les conditions énoncées ci-dessus ». (Titre 4, Chapitre 1, Article 1.1. de l’accord)
Ainsi, l’accord posait un principe d’égalité entre les femmes et les hommes uniquement en prenant en compte la rémunération de base et une méthodologie pour identifier les différences salariales excluant les rémunérations variables.
Or, l’article R. 2242-2 du Code du travail vient prévoir que l’accord ou le plan d’action fixe les objectifs de progression et les actions permettant de les atteindre ainsi que les objectifs et les actions accompagnés d’indicateurs chiffrés.
Les domaines concernés sont les suivants : embauche, formation, promotion professionnelle, qualification, classification, conditions de travail, sécurité et santé au travail, rémunération effective et articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale.
Quant à la rémunération effective, elle est obligatoirement comprise dans les domaines d’action retenus par l’accord collectif.
En effet, l’article D.1142-2 du code du travail relatif à l’index ainsi que son annexe I viennent prévoir que la rémunération à prendre en compte est la rémunération au sens de l’article L. 3221-3 du Code du travail
Or, l’article L. 3221-3 du code du travail vient prévoir que « Constitue une rémunération au sens du présent chapitre, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au salarié en raison de l’emploi de ce dernier ».
Il était donc vain pour la BNP PARIBAS de faire valoir que les dispositions portant sur l’index d’égalité professionnelle étaient inapplicables à la négociation collective.
Cela n’aurait pas fait sens que les indicateurs de l’index égalité femmes-hommes ne soient utilisés que pour définir les modalités et la méthodologie, visées à l’article L.1142-8 du code du travail et permettre à l’entreprise de calculer et de publier le résultat de l’index égalité professionnelle mais que les mesures mises en œuvre pour conduire à une égalité effective ne soient pas fondées sur les mêmes indicateurs.
Ainsi, il n’y avait pas lieu de se limiter à la rémunération fixe mais d’inclure les rémunérations variables, y compris discrétionnaires.
Et le Tribunal de considérer que :
« La prise en compte de la rémunération variable ou des compléments de salaire dans le diagnostic des écarts de rémunération est d’autant plus pertinente que les écarts de rémunération sont plus importants en matière de rémunération variable, ce fait ayant déjà été mis en évidence dans des diagnostics publiés précédemment.
En outre, même si le montant de la rémunération variable peut être différent d’une année à l’autre et repose sur les résultats du salarié, force est de constater que le fait de faire dépendre son principe et son montant à la réalisation d’objectifs déterminés lui enlève son caractère discrétionnaire.
En toute hypothèse, même à supposer que la rémunération variable soit véritablement discrétionnaire, le principe d’égalité entre les femmes et les hommes « à travail égal, salaire égal » imposerait la prise en compte de la part discrétionnaire du salaire pour permettre une véritable comparaison de la rémunération effective des hommes et des femmes dans l’entreprise, et ce faisant de l’écart entre les rémunérations effectives. »
Dans ces conditions, il est jugé que la méthodologie retenue par l’accord pour la détermination des écarts de rémunération effective entre les hommes et les femmes au sein de la BNP PARIBAS n’est pas conforme aux dispositions légales applicables en matière de mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans le cadre de la négociation obligatoire.
Restera aux organisations de se saisir de ce jugement pour, soit contester les accords conclus sous réserve que la contestation soit encore ouverte (délai de 2 mois à compter de la notification de l’accord), soit demander la révision de l’accord, soit dans le cadre des négociations à venir en tenant compte de l’ensemble des éléments de rémunérations dont la rémunération variable des salariés.