Introduites dans le code de justice administrative par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, les actions collectives sont, en contentieux administratif, de deux natures : d’un côté, l’action de groupe, destinée à faire cesser un manquement (ou réparer le préjudice correspondant) commis par une personne publique dans le respect de ses obligations, avec en particulier, l’action de groupe spécifique aux discriminations commises par un employeur public ; de l’autre côté, l’action en reconnaissance de droits, permettant à une association régulièrement déclarée ou à un syndicat professionnel régulièrement constitué de déposer une requête tendant à la reconnaissance de droits individuels résultant de l’application de la loi ou du règlement en faveur d’un groupe indéterminé de personnes ayant le même intérêt.
C’est en l’espèce le Syndicat CFDT Interco 92 qui a obtenu, par arrêt du 27 janvier 2023 de la Cour administrative d’appel de Versailles, la reconnaissance du droit des agents de la ville de Gennevilliers, à la prise en charge des frais de nettoyage et entretien des équipements de protection individuelle et tenues de travail, à la charge de la commune de Gennevilliers.
La Cour administrative d’appel de Versailles a relevé pour ce faire, que la commune de Gennevilliers avait certes conclu un marché public externalisant la prestation d’entretien auprès d’une entreprise de nettoyage, mais ce marché public ne portait que sur les équipements de protection, et non pas sur les vêtements de travail, et surtout, ne concernait que certains agents de la commune, regroupés par services, tandis que les collègues d’autres services communaux n’en bénéficiaient pas et devaient donc engager des frais personnels d’entretien et nettoyage.
Sur le fond, ce sont les règles de la 4e partie du code du travail qui s’appliquent ici, sur le fondement de la loi statutaire qui y renvoient expressément. La prise en charge des frais est en particulier prévue lorsque le port des vêtements de travail est imposé en plus des vêtements ordinaires, et lorsque l’entretien de ces vêtements occasionne des frais particuliers.
La Cour administrative d’appel de Versailles a écarté l’application de la jurisprudence du Conseil d’Etat du 29 mai 2019, dont entendait se prévaloir la commune de Gennevilliers, selon laquelle l’agent public ne peut prétendre au titre de la rémunération qui lui est versée à raison de l’emploi qu’il occupe, à d’autres indemnités que celles qui sont instituées par un texte législatif ou réglementaire. Pour ce faire, la Cour administrative d’appel de Versailles a reconnu qu’il était nécessaire de réaliser une distinction entre la rémunération et la prise en charge des frais d’entretien des vêtements et des équipements nécessaires à l’exercice des fonctions des agents, qui ne font pas partie de cette rémunération.
L’arrêt de la Cour a interrompu tous les délais de prescription à compter de sa présentation ; la demande initiale ayant été présentée le 13 mai 2018 à la commune de Gennevilliers, les agents qui auraient engagés personnellement des frais peuvent en demander le remboursement dans le délai de prescription quadriennale qui remonte donc jusqu’au 1er janvier 2014. A cet égard, l’arrêt de la Cour constitue, désormais, le titre de créances par lequel tout agent s’estimant concerné par le champ d’application du droit dont le Syndicat CFDT Interco 92, et sa Section syndicale de Gennevilliers, a obtenu la reconnaissance, pourra demander le remboursement de ses propres frais par exécution de l’arrêt de la Cour à son bénéfice individuel.
L’arrêt sera publié sur le site du Conseil d’Etat : https://www.conseil-etat.fr/Media/contenu-froid/documents/actions_collectives/ard-20200106