Un jugement rendu le 2 octobre 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon est l’occasion de rappeler les règles de preuve de l’existence d’une section syndicale.
En l’espèce, à l’issue des dernières élections professionnelles de juin 2023, un syndicat a désigné le 25 juillet 2023 un salarié élu titulaire au CSE en qualité de représentant de la section syndicale (RSS) qu’il a constituée dans l’entreprise.
L’entreprise a sollicité l’annulation de cette désignation au motif que le syndicat ne justifiait pas de la présence d’au moins deux adhérents dans l’entreprise.
En effet, la Cour de cassation a récemment rappelé que, en cas de contestation sur l’existence d’une section syndicale, le syndicat doit apporter les éléments de preuve utiles à établir la présence d’au moins deux adhérents dans l’entreprise (Cass. soc., 22 nov. 2023, nº 23-12.596).
Pour établir la preuve de la présence d’au moins deux adhérents dans l’entreprise tout en préservant l’anonymat de ses adhérents, le syndicat a transmis au seul contrôle du juge les fiches signalétiques qu’il a établies au moment de l’adhésion mentionnant l’identité des adhérents, les bulletins de paie des adhérents de juillet 2023 et les justificatifs du paiement des cotisations à la date de la désignation du RSS.
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Le syndicat n’a soumis au contradictoire que la liste électorale dressée lors des dernières élections professionnelles.
L’employeur ne s’en est pas satisfait. En cours de procédure, le syndicat a alors soumis au contradictoire une version anonymisée des pièces transmises au seul contrôle du juge à l’exception des bulletins de paie dont la communication était impossible compte tenu de la nécessité de préserver la liberté syndicale des adhérents.
Sur les fiches signalétiques, le nom de l’entreprise cédée à laquelle les adhérents appartenaient avant que leurs contrats de travail soient transférés en 2021 à l’entreprise cédante – la demanderesse en justice – a été conservé par le syndicat afin de différencier les salariés adhérents selon leur date d’embauche.
Ce détail a permis à l’employeur de distiller le doute sur la qualité de salarié de l’entreprise des adhérents et a contraint le syndicat à justifier de ce que ses adhérents étaient bien des salariés de l’entreprise au sein de laquelle la désignation du RSS a été effectuée.
Le juge a d’abord rappelé la jurisprudence désormais bien connue de la Cour de cassation en matière de preuve de l’existence d’une section syndicale : le syndicat doit apporter les éléments de preuve utiles à établir la présence d’au moins deux adhérents dans l’entreprise dans le respect du contradictoire à l’exclusion des éléments permettant l’identification des adhérents du syndicat, dont seul le juge peut prendre connaissance.
Il a ensuite analysé les éléments produits par le syndicat et a relevé, à ce titre, que trois salariés de la société défenderesse (bulletins de paie à jour) étaient électeurs lors des dernières élections professionnelles, adhérents au syndicat (fiches signalétiques) et à jour du paiement de leur cotisations (relevé mensuel depuis janvier 2023).
Il a conséquence rejeté la demande d’annulation formulée par l’employeur.
Ce jugement a le mérite de rappeler, de manière pédagogique, la liste des éléments dont le syndicat doit être en possession lorsqu’il procède à la désignation du RSS, à jour de la situation et la méthodologie avec laquelle il doit faire la démonstration de la présence d’au moins deux adhérents dans l’entreprise.